Æquido News Février 2016 – Trop d’impôt sur le capital mine l’activité économique
Le 8 février 2016, l’Institut Coe-Rexecode a publié une analyse fouillée sur la taxation du capital en France, en la comparant aux systèmes de nos principaux partenaires européens. Il ressort de cette étude que notre fiscalité du capital pèse sur la croissance et l’emploi.
Son poids est passé de 7,3% du PIB en 2015 à 10% en 2014, soit pour 2014 plus de 200 Mds€ pesant à égalité sur les entreprises et sur les ménages.
La fiscalité du capital sur les entreprises comprend, outre l’impôt sur les sociétés, les impôts sur les coûts de production des entreprises, dont le poids est très élevé par rapport à nos grands voisins (37 Md€ de plus qu’en Allemagne en 2014). Il s’agit principalement :
- des prélèvements assis sur la masse salariale,
- de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE),
- de la cotisation foncière des entreprises (CFE),
- de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).
La fiscalité du capital sur les ménages comprend les impôts sur le revenu du capital (intérêts, dividendes), sur les plus-values, sur la détention du capital (ISF, taxe foncière) et sa transmission (donation, succession). Son poids dépassait de plus 40 Md€ celui de la taxation du capital des ménages allemands en 2014. Il est passé en France de 38% du total des revenus du capital des ménages en 2015 à plus de 60% en 2014, notamment suite à la suppression par la loi de finances 2013 du prélèvement forfaitaire libératoire, au profit de l’impôt sur le revenu à barème progressif, venant s’ajouter aux 15,5% de prélèvements sociaux.
« La France est le seul pays européen qui cumule deux impôts progressifs sur le patrimoine, l’un sur la valeur du patrimoine (ISF), l’autre sur les revenus que ce patrimoine génère » constate Michel Didier, président du Coe-Rexecode. Le rapport précise que pour 150€ d’intérêts sur une épargne de 10.000€, il ne reste aux contribuables français les plus taxés que 15,3€ de revenu disponible après prélèvements obligatoires, à comparer à 110,4€ en Allemagne et 131,2€ en Italie. Cette confiscation conduit les plus gros contribuables à franchir les frontières de l’hexagone, avec une multiplication des non résidents qui ne cotisent plus au budget de l’Etat français. Autant dire que le potentiel fiscal de la France décroît inexorablement.
Pour chercher à limiter les conséquences de ces excès de progressivité, les gouvernements successifs multiplient les mesures dérogatoires – abattements, déductions et aménagements divers. Ces « niches » contractent les assiettes taxables et rendent notre fiscalité illisible. La complexité et l’instabilité chronique des règles fiscales perturbent les décisions d’épargne et d’investissement et découragent les projets de long terme. La fiscalité du capital en France encourage l’épargne liquide ou orientée vers la dépense publique au détriment de l’investissement productif. L’instabilité, les sauts d’imposition brutaux et les effets de seuil entraînent des comportements de protection ou de prudence et ont des conséquences économiques défavorables. Ces effets pervers sont autant d’obstacles à la croissance de nos entreprises de taille moyenne ou intermédiaire.
Face à ce constat d’une fiscalité du capital restrictive pour l’activité et l’emploi et d’un excès de progressivité diminuant le taux d’accumulation du capital et donc le taux de croissance potentiel de l’économie, l’Institut Coe-Rexecode préconise des changements majeurs dont l’axe principal porte sur la fiscalité du capital des ménages.
- Création d’un prélèvement unique et forfaitaire de 30% assis sur tous les revenus du capital et se substituant au système actuel. Ce prélèvement regrouperait l’impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux et l’imposition du patrimoine.
- Suppression de nombreuses niches fiscales devenue inutiles.
- Création pour la petite épargne d’une franchise d’imposition sur les revenus du capital.
- Diminution sensible des droits de donation par rapport aux droits de succession, afin de faire circuler le patrimoine vers les jeunes générations et de leur permettre de réaliser leurs projets plus tôt dans la vie.
Voilà un rapport qui devrait trouver un certain écho chez les futurs candidats à la présidentielle de mai 2017, dont certains sont déjà favorables à la suppression de l’ISF, même si cette proposition reste impopulaire. La vulgarisation de telles études est de nature à faire comprendre à nos concitoyens que l’excès de progressivité de la taxation du capital incite les plus gros patrimoines à quitter la France pour échapper à l’impôt, tandis que les contribuables qui ont acquis par leur effort un patrimoine bien moindre doivent payer l’impôt sur le capital à partir de leurs revenus du travail (en plus de l’impôt normal qu’ils acquittent sur les revenus du travail).